Plutôt que de juger les lycéens et les étudiants, comme le font de nombreuses personnes sur les réseaux sociaux qui se permettent de juger les uns et les autres sans rien savoir, je préfère aller les voir, leur poser des questions et essayer de les comprendre.
Avec mon ami Philippe Bariol, gérant du site Sainté Debout, nous nous rendons sur la place Jean Jaurés à Saint Etienne et là, nous assistons à des scènes apocalyptiques. Les CRS ont lancé des bombes lacrymogènes, une maman pleure avec son bébé dans les bras, des jeunes et des personnes âgées suffoquent et pleurent également, nos yeux commencent à brûler. Tout le monde est choqué ! Un homme s’énerve, insulte des jeunes et commence à les bousculer. Tous se reculent ! Qui est cet homme ? Les gens s’interrogent et l’on apprend plus tard que c’est un forain qui très vite a rejoint son chalet derrière les barrières place de l’Hôtel de ville. A ce moment là, aucun chalet n’a pourtant été touché !
Je m’approche alors de différents groupes de jeunes pour leur demander les raisons de leur participation à cette manifestation. Si certains m’avouent qu’ils sont là simplement pour faire sauter des cours, d’autres se sentent pleinement citoyens. Ils me parlent des problèmes d’affectations qu’ils rencontrent avec « Parcours Sup », de la réforme des lycées. Ils me parlent des situations précaires de leurs familles et se sentent pleinement solidaires des gilets jaunes. « Dans l’un des 5 pays les plus riches du monde, la misère est insupportable ! » Certains sont soucieux des risques que court la planète mais refusent que la transition écologique se fasse de manière punitive pour les plus modestes ! Tous sont pour la poursuite des mouvements des gilets jaunes même si ils regrettent les violences de quelques uns. « Le gouvernement a laissé la violence s’installer dans le pays, le calme n’est pas prêt de revenir ! Pour cela, il faudrait que Macron démissionne et que les problèmes soient remis à plat ! »
J’aperçois Brice Telki, l’un des gilets jaunes les plus actifs sur la région stéphanoise, et décide de lui poser quelques questions. Il me déclare qu’il est très heureux que les lycéens et les étudiants manifestent, même si il regrette les débordements « Les CRS n’ont pas cherché à comprendre. Ils ont balancé directement des gaz lacrymogènes » (j’apprendrai plus tard que les CRS ont réagi face à des casseurs mais qu’ils n’ont pas fait de différence entre les casseurs et les manifestants pacifiques. Ils ont gazés tout le monde!) J’interroge Brice sur les mesures prises par le gouvernement actuel. Il me répond qu’elles ne serviront pas à calmer les colères des gilets jaunes. « Les revendications ne se mesurent pas uniquement sur la taxe carbone. Nous devons nous battre pour l’augmentation des salaires, le retour de la retraite à 60 ans à taux plein, le rétablissement de l’ISF, la baisse de toutes les taxes… » Brice énumère un certain nombre de revendications. Toutes sont-elles vraiment possibles ? Une seule chose est sûre : le gouvernement a laissé pourrir une situation qui lui a échappé et les manifestations ne sont pas prêtes de s’arrêter !
Ce week-end s’annonce particulièrement violent à Saint Etienne, comme dans le reste du pays !