Madame Zineb Ouahmane, une directrice d’école engagée…

Le 24 juin, 4 jours avant le 2ème tour des élections municipales, une note que Madame Zineb Ouahmane, deuxième de la nouvelle liste socialiste et écologiste de « Saint Etienne Demain », avait écrite à ces colistiers pour leur faire part de ses intentions de ne plus faire campagne dans cette élection est rendue publique. Certains stéphanois, qui ne s’en étaient peut-être pas rendus compte jusqu’alors, découvrent que la liste menée par Mr Courbon est sous le contrôle de plusieurs partis et que les citoyens, qui ne sont pas des militants politiques encartés ou très proches du parti socialiste, sont tenus à l’écart de toutes les décisions. Mr Courbon tente alors de faire passer madame Ouahmane pour une vieille femme (Zineb Ouahmane n’est pourtant pas une personne âgée: elle n’a que 56 ans!) affaiblie par la campagne des municipales. Celle-ci s’en défend, rassure ses proches et explique les raisons de sa décision. Une partie des membres de « Saint Etienne demain » décide alors de la descendre verbalement. Choqué par les attaques dont elle est devenue la cible sur les réseaux sociaux, je choisi de lui apporter mon soutien et d’essayer de mieux comprendre ce qu’il s’est passé. Je découvre alors une femme profondément blessée mais toujours battante et prête à se relever. Elle me fait part de toute sa déception puis me confie: « J’ai appris à n’être affectée que le temps de la réflexion et de la prise de décision, ensuite je zappe. »

Mais qui est madame Zineb Ouahmane?

Je la connais peu. Nous ne correspondons que depuis le 28 juin sur les réseaux sociaux mais ce que je peux en dire c’est que c’est une femme très cash qui dit ce qu’elle pense. Tout de suite, nous nous tutoyons. Elle me déclare tutoyer les personnes qu’elle apprécie. Je la remercie donc. Prévert disait: « Je dis tu à tous ceux que j’aime! »

Zineb est née à Saint Etienne, une ville qu’elle n’a jamais quittée, elle est mère de 3 grands enfants et exerce le métier de directrice d’école. Après des études d’Histoire, elle a travaillé au CERCOR (un laboratoire d’études sur les monothéismes fondé en 1982 à l’initiative de Pierre-Roger GAUSSIN, professeur d’histoire médiévale à l’Université de Saint-Étienne.  le CERCOR a pour but de fédérer les recherches en histoire monastique et religieuse.) Pierre-Roger GAUSSIN ne pouvant plus exercer à cause d’un accident vasculaire, Zineb a quitté le CERCOR et abandonné sa thèse pour travailler au musée d’art et d’industrie jusqu’à la naissance de son aînée. Elle a ensuite passé le concours de professeur des écoles à l’âge de 30 ans puis, ses enfants ayant grandi, elle a accepté la fonction de directrice d’école en 2012 à La Métare. Elle avait déjà fait fonction de directrice en 2007 et les missions confiées lui paraissaient intéressantes.

Une femme de terrain

Quand je lui ai demandé quelles étaient les raisons qui l’avaient poussée à s’engager politiquement sur une liste, Zineb m’a tout de suite parlé de réalisations très concrètes, de projets auxquels elle avait participés et de son envie d’améliorer les choses en partant de ce qui pouvait se faire dans les quartiers:

« J’ai eu la chance à l’école de la Réjaillère de participer aux gros travaux de rénovation de cette école, allant voir les ouvriers durant l’été, vérifiant le respect de ce qu’avaient demandé les enseignants, et j’ai vu cette école se transformer au fil des années : peintures de rafraîchissement, éclairages, tableaux, sols, couloirs, ascenseur, place PMR.  La cantine a fait l’objet d’un gros projet en partenariat avec la Ville de Saint-Etienne sous Maurice Vincent, l’Espace Boris Vian, la Cité du Design et l’Education nationale. Les élèves sont devenus de petits designers et ont contribué au choix des matériaux, des couleurs, du mobilier en apprenant à rédiger un cahier des charges.

Cet élan donné nous a poussés à étendre cette collaboration avec le collège du Portail rouge et la « liaison école-collège » tant souhaitée par les institutions n’a pas été chez nous une vague expression mais un réel travail de cohésion. Je remercie vivement et chaleureusement les merveilleux professeurs du collège du Portail rouge avec lesquels un vrai travail a été mis en place pour les élèves tant en mathématiques ( rallye-maths) , qu’en français (rallye- lecture), qu’en sciences ( co-animation, co-enseignement et voyage à Vulcania), qu’en anglais (voyage à Londres) sans oublier le petit film réalisé par l’enseignante du dispositif ULIS du collège avec ses élèves pour rassurer nos petits CM2, répondre à leurs questions…..Pour toutes ces raisons, je me suis sentie prête à m’engager politiquement.

Lorsque j’ai reçu un appel téléphonique m’invitant à me rapprocher de Saint Etienne Demain, j’ai au départ été étonnée car je connaissais très peu Mr Courbon mais certaines personnes sympathisantes de Saint Etienne Demain sont des personnes que j’estime et respecte profondément, Marc Boyer en faisait partie, nous nous sommes connus lorsque mon école est devenue école pilote pour « le temps Peillon », à titre expérimental nous avions durant une année mis en place des activités avec la Ville pour tester leur faisabilité et quel travail, quelle collaboration ! Une année passée dans le travail, le respect, la courtoisie et la bienveillance. Ce que je n’ai pas retrouvé auprès de Mr Courbon et de ceux qui l’entouraient. » (Monsieur Marc Boyer n’a pas participé (ou a été exclu) de la liste « Saint Etienne Demain » après le 1er tour).

Une femme blessée mais combattante

Zineb Ouahmane me confie: « je pense préférer la politique de terrain, me sentir utile, faire, me tromper parfois, essayer, m’excuser, reprendre sans blesser l’autre, j’aime connaître les personnes avec lesquelles je travaille, j’aime regarder les gens dans les yeux, voir le regard de l’autre et me faire mon propre jugement, je reste dans l’humain. » Comme elle le dit, Zineb n’aime pas parler en mal des autres et elle s’excuse presque lorsqu’elle me parle de ceux qui l’ont fait souffrir: « J’ai, malheureusement rencontré beaucoup d’hypocrites dans cette campagne et j’aurais aimé plus de respect et de vraie fraternité entre les colistiers. Ailleurs que dans les discours, je n’ai rien trouvé des valeurs que je désirais porter au sein de la liste menée par Mr Courbon. J’ai tenté plusieurs fois d’en parler avec lui mais il ne m’a jamais écoutée. »

Finalement, les personnes qui sont en dehors des partis politiques font parfois plus de politique au sens noble du terme que les « politiciens ». 

Une femme d’action

Zineb a été fortement déçue mais c’est une femme chargée d’énergie positive et, aujourd’hui, elle souhaite tourner la page sur cette aventure et s’ouvrir à d’autres projets. Elle constate que cette année particulièrement difficile l’a rendue plus forte et lui a beaucoup apporté. Elle pense à ses élèves, à leurs parents et aux professeurs qui ont été formidables pendant la période de confinement. Elle m’écrit: « Durant le confinement, nous avons appris à déléguer et les parents ont su faire, beaucoup, ils l’ont su et chacun à leur manière : en se connectant, en téléphonant, en se déplaçant, qu’importe. Lorsque nous enseignants avons voulu, nous avons pu atteindre un maximum de parents. Certains se sentent démunis, parfois dévalorisés, il nous faut redonner aux parents leur place légitime c’est à dire la première place. Plus que jamais, l’espace des parents doit exister et nous devons avec l’éducation populaire dessiner ce triangle d’or. »

Ces temps-ci, toujours très active, Zineb travaille en collaboration avec le FJEP (Foyer des Jeunes d’Education Populaire) sur les « colos apprenantes ». « Nous avons appelés les familles qui se sentent soulagées de pouvoir laisser partir leurs petits 5 jours afin de bénéficier à la fois de soutien scolaire et d’activités ludiques, sportives et culturelles. » Elle remercie les agents municipaux « qui triment dur en ce moment pour finaliser les inscriptions, envoyer les dossiers de confirmation et Karim Gahdoum, Directeur du FJEP qui oeuvre toujours avec générosité et bienveillance pour le bien être de nos enfants du quartier de la Métare. »